Un divorce impacte nécessairement les finances du couple. Les conséquences financières sont multiples et nécessitent de trouver la solution la plus équitable, au regard de la loi : À qui sont versées les prestations familiales ? Qui règle la taxe foncière ? Comment est calculée la pension de réversion ? Diverses prestations peuvent également être versées (pension alimentaire, indemnité d’occupation, soulte…). L’une d’elles, la prestation compensatoire est une indemnité accordée après l’étude de divers critères d’évaluation. Il s’agit de déterminer si son versement est justifié. La situation du couple, la nature même du mariage ou la procédure de divorce, déterminent son calcul et son attribution. Que se passe-t-il en effet lors de la liquidation du régime matrimonial ?
En quoi impacte-t-elle le versement de la prestation compensatoire ? Est-ce que le régime de séparation de biens permet d’éviter la prestation compensatoire en cas de divorce ?
Le régime de la séparation des biens
Le régime matrimonial établit les rapports patrimoniaux entre les époux. Lorsqu’un couple se marie, il opte entre différents régimes matrimoniaux, dont les principaux sont le régime de la communauté (dite « réduite aux acquêts), la séparation de biens et la communauté universelle.
En l’absence de contrat de mariage, un couple est marié sous le régime de la communauté. Cela signifie que les biens qu’il achète durant leur mariage sont automatiquement mis en commun pour moitié chacun.
Le régime de la séparation des biens signifie que chacun des conjoints gère et dispose de ses biens propres. Le couple ne compte comme biens communs que ceux qu’il acquiert durant le mariage. On parle alors de biens acquis en indivision. Un contrat est établi, dans lequel le notaire peut ajouter des clauses, selon les souhaits des époux.
Ainsi, le régime séparatiste permet aux époux de conserver leurs biens propres pendant le mariage.
La prestation compensatoire
Aussi appelée « pension » ou « indemnité » compensatoire, la prestation compensatoire est une aide financière versée par l’un des époux à son ex-conjoint. Prévue par l’article 270 du Code civil, elle permet de compenser l’existence d’un déséquilibre financier entraîné par la séparation. Elle est versée sous forme forfaitaire à l’issue du divorce.
Attention toutefois, cette indemnité ne vise pas à rétablir une égalité financière entre les époux, mais bien à compenser une trop forte disparité de niveaux de vie causée par la rupture.
Bon à savoir
La prestation compensatoire permettait initialement de répondre à la disparité des niveaux de vie des couples où seul l’homme travaillait pour subvenir aux besoins du ménage. Ainsi, elle servait à protéger la femme au foyer, nécessairement défavorisée par le divorce. Aujourd’hui, cette indemnité peut être versée même lorsque les deux conjoints travaillent… à condition toutefois que la fin du mariage engendre un réel écart de niveau de vie entre eux.
Comment la prestation compensatoire est-elle calculée ? Quand est-elle due ?
La prestation compensatoire ne s’appuie sur aucun barème officiel. Pour la calculer, il faut prendre en compte plusieurs critères, qui s’ajoutent à ceux prévus par le Code civil.
Quelles sont les conditions permettant de percevoir la prestation compensatoire ?
Contrairement à une idée reçue, la prestation compensatoire ne dépend pas seulement des revenus des époux. Elle se base sur des critères très variés, qui dépendent de la situation de chaque couple. Ainsi, sont pris en compte les droits à la retraite de chacun, les charges (comme le remboursement d’un prêt), mais également les sacrifices professionnels qui ont pu être consentis, par exemple pour permettre l’éducation des enfants ou encore la durée du mariage.
Certains critères sont plus faciles que d’autres à évaluer. Cela revient à plaider sa cause… Vous avez démissionné dans l’intérêt de votre ménage ? Accepté de suivre votre conjoint dans une autre ville ? Refusé une promotion ? Tous ces éléments peuvent jouer en faveur d’une indemnité compensatoire.
Voici les critères prévus par le Code civil :
- “ la durée du mariage ;
- l’âge et l’état de santé des époux ;
- leur qualification et leur situation professionnelles ;
- les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ;
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;
- leurs droits existants et prévisibles ;
- leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu’il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l’époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa. ”
Cette liste n’est pas exhaustive. D’autres éléments peuvent être appréciés par le couple qui s’entend sur cette prestation ou le juge aux affaires familiales.
Pour répondre à un cas de figure précis, à lire aussi : la prestation compensatoire peut-elle être perçue en cas de divorce pour faute ?
A retenir
La prestation compensatoire n’est en réalité accordée qu’à très peu de couples qui en font la demande. Ainsi, si vous n’avez pour tout patrimoine que votre logement commun, si chacun des membres du couple travaille et que votre mariage n’a pas duré longtemps, il faudra justifier d’un écart de revenu très important et/ou d’un sacrifice de carrière, par exemple, pour que soit accordée cette prestation.
Enfin, la prestation compensatoire n’est pas une rente. Elle doit être versée en capital et son paiement ne peut être étalé que sur huit ans maximum.
Le régime de séparation de biens permet-il d’éviter la prestation compensatoire en cas de divorce ?
Puisque le régime de séparation des biens implique que les époux restent chacun propriétaires des biens qu’ils ont acquis avec leurs propres revenus, l’indemnité visant à compenser un déséquilibre financier entre les ex-époux deviendrait injustifiée ? La réponse est non ! La prestation compensatoire est envisageable quel que soit le régime matrimonial qui soutenait votre mariage. Elle peut même s’avérer plus importante pour un couple marié sous le régime de la séparation des biens ! En effet, une certaine disparité financière peut se creuser au sein du couple, si l’un des époux, possédant des revenus plus conséquents, a davantage de biens lui permettant de se constituer un patrimoine plus important. Autrement dit, un couple marié sous le régime de la communauté, au moment du divorce, se partage un patrimoine commun, ce qui atténue nettement les écarts entre les ex-époux.
Ainsi, même en cas de revenus faibles, le patrimoine personnel est pris en compte dans le calcul de la prestation compensatoire. Toutefois, il est primordial de garder à l’esprit que cette indemnité ne vise pas à égaliser la situation financière des époux, mais à compenser une différence de niveau, déjà à l’œuvre durant le mariage.
Ainsi, lorsque les époux sont mariés sous le régime séparatiste, le calcul de la prestation compensatoire doit être réalisé en gardant à l’esprit que cette indemnité n’a pas pour objet de compenser les inconvénients ou les injustices générées par la séparation des biens, qui a été librement choisie par les époux au moment de leur union. Pour la jurisprudence, le patrimoine personnel des époux ne devrait donc pas nécessairement influer sur le montant de la prestation compensatoire.
A retenir
La prestation compensatoire est due même si vous étiez mariés sous le régime de la séparation des biens.
Décision du juge et jurisprudence
L’indemnité compensatoire peut faire l’objet d’une négociation à l’amiable. En cas de conflit, dans le cas d’une procédure de divorce contentieux, il revient au juge aux affaires familiales d’en fixer le montant. Surtout, il décide d’accorder ou refuser cette prestation en appliquant les critères d’évaluation à la situation du couple (durée du mariage, carrières confrontées à la vie commune et à la tenue du foyer, rôles parentaux, etc.). L’indemnité est alors entièrement soumise à l’approbation du juge.
Selon la jurisprudence, la prestation compensatoire ne doit pas servir à gommer les disparités financières causées par le régime de séparation des biens des époux. Autrement dit, elle ne peut pas avoir pour but de corriger les injustices liées à ce régime. Elle s’attache seulement à la disparité des revenus que la rupture du mariage engendre dans les conditions de vie respectives de chacun.
Bon à savoir
La prestation compensatoire peut faire l’objet d’une discussion au sein du couple qui se sépare. En effet, un divorce à l’amiable peut évidemment conduire au versement de cette prestation, en cas de commun accord. Il suffit de l’inscrire dans la convention de divorce. Le rôle de l’avocat sera de vous aider à la calculer, au regard de votre situation (pour bien prendre en compte tous les critères).
Quelles que soient les modalités du divorce (procédure amiable ou contentieuse), une prestation compensatoire peut être versée si la séparation entraîne une disparité du niveau de vie trop importante. Retenez que la prestation compensatoire est possible, quel que soit le régime matrimonial choisi. En l’absence de barème officiel, le couple aidé de ses avocats ou le juge, en cas de divorce conflictuel, se fonde sur toutes une série de critères permettant de calculer et d’attribuer cette indemnité.